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Les mines
A la fin du 18ème siècle, le gouvernement français envoie en Corse un mission minière, dirigée par l'ingénieur de Gensanne. Les résultats de ces prospections sont connus sous le nom de plan Terrier. Il s'agit en fait d'un "état des lieux", suite à l'achat de cette île aux génois...
Au cours de plusieurs siècles d'occupation, ces derniers ont effectué quelques travaux sur certains gisements, mais n'ont jamais entrepris d'exploitation sérieuse. Sans doute ont-ils été rebuté par les difficultés d'extraction et manquaient-ils de moyens ?... Force est de constater qu'ils ont fait preuve de d'avantage de circonspection et de pragmatisme que leurs successeurs...
Entrée d'une galerie de mine datant de l'époque génoise (Castifao)
Au milieu du 19ème siècle, la Révolution Industrielle aborde
la
Corse, drainant dans son sillage nombre d'aventuriers...
Ils s'appelaient Comte Lecoat de Kerveguen, Schloessing, Imer,
Foëx,... Les sociétés
minières fleurissent et se parent de noms exotiques : South
Aurora Compagny, The Olmeta Copper Compagny of Corsica Limited....
Durant cinquante ans,
l'optimisme est de rigueur, certains budgets frisent le délire,
prévoyant jusqu'à 250 000 francs (de l'époque!)
de bénéfice...
Complexité de la géologie locale, approximation dans l'estimation des
gisements, analogie hasardeuse avec les sites de Toscane, difficultés
d'extraction et d'exploitation liées au manque d'infrastructures routières et
ferroviaires... Rien n'arrêtera ces nouveaux pionniers
Les mines de Caccia
Le sous-sol de la Pieve di Caccia, qui s'étend de la rivière Tartagine au nord jusqu'à l'Asco au sud, recèle un certain nombre de minerais : du cuivre bien entendu, mais aussi du plomb argentifère, de l'arsenic et du fer. La richesse des gisements n'a jamais été estimée réellement. Bien souvent la bibliographie officielle est lacunaire, de même que la mémoire collective semble avoir oublié jusqu'à l'existence de certaines galeries...
A la décharge des chercheurs, il faut évoquer les conclusions lapidaires d'un Ingénieur des Mines chargé, à la fin des années 1870, d'établir un rapport d'inspection sur les mines de Caccia, qu'il conclura en ces termes :
"Fut-on du reste sûr de l'existence et de l'abondance du minerai qu'on ne serait nullement assuré d'une exploitation fructueuse dans un pays perdu comme celui-là, où les chemins n'existent pas, et où ils sont à peine faisables..."
Pourtant connus au 16ème siècle par les génois, quelques filons de minerai de cuivre sont exploités dés 1851 sur le versant nord de la colline de Sant'Augustinu, sur le territoire de la commune de Castifao. Il est probable que la découverte de pillow-lavas sur le flanc de cette montagne soit à l'origine des prospections. Les sulfures de cuivre sont fréquemment associées à des manifestations volcaniques et à l'émission de pillow-lavas.
Pillow-lavas de Sant'Augustinu
A Moltifao, des galeries sont creusées à l'est du village, entre les ravins de Calmi et d'Alzia. Deux autres galeries sont creusées dans le vallon des Conche. La plus proche du sommet, sur le versant Est, mesure plusieurs mètres de profondeur.
L'exploitation de Sant'Augustinu est
entreprise par un consortium d'industriels venus du Continent. En 1855,
une
vingtaine de tonnes de cuivre est extraite, à un taux de
17 à 21%. Deux ans plus tard, sur une concession de 1520
hectares, 10 piqueurs, 10 manoeuvres et 1 forgeron produisent 243
quintaux de minerai à 15-16% de cuivre et 460 quintaux à
5%. Sept ans plus tard, un four installé en bordure du Tartagine, produit huit tonnes de cuivre et cesse son activité
peu après. Après une mise en
sommeil, l'exploitation de la mine reprend en 1875.
Sulfures. Mine de cuivre (Castifao)
Vingt ans plus
tard, eu égard à leurs déboires, la déchéance des exploitants Schloesing et
frères est prononcée. La mine est acquise par les
banquiers Gregorj. Elle fonctionne quelques années mais semble pourtant
définitivement abandonnée en 1908. La faillite de la
fonderie de Francardo et la Première Guere Mondiale sonnent le
glas de l'activité minière. En 1914, le maire de Castifao demande la fermeture des puits.
En une cinquantaine d'années, les pertes des mines de Saint-Augustin s'élèvent à un total de plus trente mille francs de l'époque !!!
Et un contrôleur des mines de l'époque de conclure
alors :
"La
légende de Saint-Augustin, la plus riche des mines de cuivre de
la Corse est
malheureusement bien
ébranlée..."
Une étude menée dans
les années soixante par le BRGM sur le gisement de Sant'Augustinu montrera que l'hypothétique filon ne mesure qu'une centaine de
mètres de long sur 20 à 50 centimètres de large...
L'histoire des mines de fer situées sur la commune de Moltifau demeure un peu plus obscure. A l'heure actuelle, de nombreuses questions restent en suspend : qui les a exploité, à quelle époque,comment, pourquoi ?...
La profondeur de l'une d'entre elles (plus de huit mètres), la taille des concrétions de sulfate de fer (plusieurs dizaines de centimètres), laisse songeur quand on observe la topographie environnante "dans un pays perdu comme celui-là, où les chemins n'existent pas, et où ils sont à peine faisables..."
Mais voici un autre exemple d'exploitation minière...
Le marbre et la chaux
La Corse est partagée en deux entités : une Corse ancienne (essentiellement granitique) et une Corse alpine (essentiellement schisteuse). Entre les deux se situe une zone constituée de roches sédimentaires, appelée "dépression centrale", dans laquelle se trouve du calcaire et quelques gisements de marbre.
Le marbre est une roche métamorphique dérivant du calcaire. Le plus célèbre est celui extrait des carrières de la Restonica et de Corte. Mais l'éphémère gisement de marbre Castifao a au moins permis d'orner une chapelle toscane...
Au 19ème siècle, des carriers italiens tentent d'extraire du marbre à Moltifao. Le Journal de la Corse du 19 décembre 1854 se fait l'écho de ce début d'exploitation en notant toutefois que située "en dehors de toute voie de communication", cette brèche "a exigé des travaux préliminaires très importants, qui ne sont pas encore terminés".
Cette carrière a été exploitée durant un quart de siècle environ par une famille (Pietri, il me semble) d'Olmi-Capella, avant de fermer définitivement dans les années 1890...
Presque un siècle plus tard, la Mairie de Moltifau a refusé le permis d'exploitation du même site à une entreprise de cimentier.
La maison des marbriers de Moltifau, bâtie vers 1850
Car, comme le soulignent Jean Arrighi et Françoise Giorgetti, "en réalité, la plupart des calcaires corses sont utilisables en pierre à chaux ; peu nombreux sont ceux utilisables en marbrerie".
On trouve encore nombre
de ces antiques fours à chaux dans la Pieve di Caccia, à proximité des brèches
d'exploitation du marbre...
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